Les infos américaines du moment

Keystone / AP Mark Lennihan

Les Etats-Unis sous couvre-feu. Dans le sillage des manifestations pacifiques, des pillages nocturnes contraignent les métropoles américaines à imposer une heure de rentrée à la population. New York, qui a connu de nombreuses déprédations dans la nuit de lundi à mardi, malgré un couvre-feu fixé à 23 h, demande désormais aux résidents de se cloîtrer dès 20 h. A Santa Monica, les habitants sont même priés de rester chez eux dès 14 h.

«Tirer sur les pillards»: le laisser-faire controversé de Facebook. Les associations de droits civiques reprochent à Mark Zuckerberg son inaction face à un message où Donald Trump préconisait de tirer sur les pillards («When the looting starts, the shooting starts»). De nombreux employés de Facebook ont également pris la parole contre leur patron. Au contraire, Twitter avait décidé de restreindre le même message pour infraction à ses règles contre la glorification de la violence.

Six policiers d’Atlanta inculpés après une interpellation musclée. Lors d’un contrôle routier durant les manifestations à Atlanta, des membres des forces de l’ordre ont passé au taser deux étudiants noirs sans raison apparente. Deux agents ont été licenciés et les quatre autres sont pour l’heure réaffectés à des tâches administratives.

Le conseil scolaire public de Minneapolis vote la résiliation de son contrat avec la police. Le district «ne peut pas s’aligner sur la police de Minneapolis et prétendre lutter contre le racisme institutionnel», a déclaré un membre du conseil d’administration.

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Dans le radar

Le Caucus noir du Congrès prépare un paquet législatif contre les violences policières. Le groupe de députés noirs se charge de rédiger une première ébauche de lois dans la foulée de l’affaire George Floyd. Les élus vont discuter des dizaines de propositions relatives à l’usage disproportionné de la force ou au profilage racial. Le camp démocrate souhaite voter le texte au plus vite, avant la fin juin.

Le président a-t-il le droit de faire intervenir l’armée? En résumé, oui, dans certaines circonstances. Il y a déjà des milliers d’hommes de la Garde nationale, la force de réserve de l’armée américaine. Ils sont déployés dans plus de 20 États américains pour tenter de réprimer les manifestations. Mais ces forces ont été demandées par les villes ou les États eux-mêmes. Toutefois, une loi américaine du 19e siècle définit les circonstances dans lesquelles le gouvernement de Washington DC peut intervenir sans l’autorisation des États.

Est-ce la crise que Donald Trump espérait? On a beaucoup spéculé sur la façon dont les protestations affecteront les chances de réélection de Trump. La vérité c’est que personne ne sait comment cela se passera. Certains estiment que sa posture de soi-disant président de l’ordre et de la loi fait un lui ce que Richard Nixon a été en 1968. D’autres qu’il a beau tenter de singer Nixon, il sera tenu responsable du chaos qu’il a encouragé.

Keystone / April Saul via AP

Des policiers américains marchent avec les manifestants. A Newark, New Jersey, ou Flint, Michigan, les forces de l’ordre se sont rangées du côté des manifestants. Ces villes ont connu peu de violences. Des images fraternelles et pacifiques, mais aussi le résultat d’années de travail pour renforcer la confiance entre la police et la population, selon le maire de Newark. Elu en 2014, il a mis sur pied un comité citoyen d’évaluation de la police, engagé plus d’agents issus des minorités ethniques et formé ces derniers aux notions des droits civiques. Des mesures couronnées de succès, malgré l’opposition initiale des puissants syndicats de police.

Dans la tourmente politique

Keystone / AP Patrick Semansky

Le président de la division. Lundi, Donald Trump se présentait comme « le président de la loi et de l’ordre » et évoquait l’intervention de l’armée pour mater les manifestations. Une annonce reçue froidement par de nombreux maires et gouverneurs, qui rappellent que les autorités fédérales ne peuvent envoyer leurs troupes qu’à la demande des Etats. Dans le même temps, la maire de Washington désavoue la dispersion violente des manifestations ce lundi par la garde nationale. L’opération avait pour but d’ouvrir la voie au président, qui s’est rendu dans une église endommagée pendant les événements, où il a posé Bible en main face aux photographes. A leur tour, plusieurs autorités ecclésiastiques ont protesté contre ce qu’ils considèrent une récupération religieuse des événements.

Promesses électorales de Joe Biden contre le racisme institutionnel. Le candidat à l’investiture démocrate s’est engagé à employer ses 100 premiers jours de présidence à la lutte contre le racisme. Il compte notamment mettre en place un organe fédéral de contrôle des forces de police, et un plan de relance économique centré sur l’accès à l’éducation, au capital et aux investissements à l’intention des minorités. Joe Biden devrait également assister aux funérailles de George Floyd à Houston, selon l’avocat de la famille.

Comment la Chine récupère les manifestations américaines. Les médias officiels chinois exploitent les débordements aux Etats-Unis pour faire l’apologie de leur gouvernement autoritaire. Ils pointent notamment du doigt les doubles standards de Washington et de son soutien aux manifestants de Hong Kong, qualifié d’hypocrite. L’image de démocratie modèle des Etats-Unis prend un sérieux coup dans l’aile : du pain bénit pour la propagande de Beijing, qui devrait en profiter pour décrédibiliser les courants démocratiques sur son propre territoire.

Pendant ce temps sur Heidi.news

La pandémie cède le pas à l’optimisme. La seconde vague tant redoutée n’est pas encore là, et un vent d’euphorie souffle sur l’Europe en plein déconfinement. Que penser des invitations à prendre le virus (un peu) plus à la légère?

La Suisse teste la libéralisation de la marijuana. Pendant cinq ans, Berne va mettre en place une politique limitée de légalisation du cannabis pour en évaluer les impacts sociaux et les effets sur le marché noir. Les produits devront être suisses et bios.

Analyses et opinions

Trump et le droit à l’hostilité raciale. En quoi Donald Trump a-t-il servi les intérêts de son électorat populaire? Selon Paul Krugman, Nobel d’économie et éditorialiste au New York Times, le président aura surtout dépouillé les plus modestes de leur assurance maladie et aggravé la situation des agriculteurs avec ses guerres commerciales. Mais en contrepartie, il leur aurait donné le droit d’afficher sans complexe leur hostilité raciale.

Le regard d’un conservateur sur le président. En juillet 2017, Donald Trump demandait goguenard à des policiers de ne pas être « trop gentils » lors des appréhensions de suspects. « Son vœu a été exaucé en 8 minutes et 46 secondes sur un trottoir de Minneapolis », déplore le pourtant très conservateur George Will, pour qui la décrépitude morale américaine fait les intérêts des régimes autoritaires russes et chinois.

La dangereuse théorie du chaos. On utilise ce mot à toutes les sauces pour décrire les manifestations. Selon Megan Garber, éditorialiste à The Atlantic, le terme de chaos, loin d’être neutre, suppose la totale absence de logique des tumultes. S’il fait sens dans la bouche de Donald Trump, qui qualifie tous les manifestants de voyous, il est contre-productif pour les médias qui veulent informer le public sur les racines sociales des manifestations.