Bonjour, c’est Lionel à Boston, où l’on continue à défiler contre les violences policières. Comme ailleurs dans le pays, les manifestants sont toujours plus nombreux à exiger une réallocation des fonds destinés aux forces de l’ordre.
Au menu ce matin : mariage pour tous au Conseil national, chute boursière suite à l’annonce de la FED, le microbiote humain dans un bunker de l’armée suisse. Et en guise de post-scriptum, quelques notes que je vous envoie du pays de la peur. |
Rappel des infos qui comptent
|
Keystone / AP Manuel Balce Ceneta
|
Les Etats-Unis sanctionnent des enquêteurs du Tribunal pénal international.
Il y a deux mois, la Cour basée à La Haye autorisait une enquête sur de potentiels crimes de guerre américains en Afghanistan. En représailles, le président Trump a émis un décret visant directement certains membres du Tribunal et leur famille, incluant sanctions économiques et restrictions de visas. Les Etats-Unis se sont retirés du traité du TPI en 2002.
NPR (EN)
|
Le Conseil national approuve le mariage et la PMA pour tous.
Les députés ont accepté par 132 voix contre 52 un projet qui ouvre à tous le mariage, la procréation médicalement assistée, l’adoption conjointe et la naturalisation facilitée du partenaire. Seul le groupe UDC l’a refusé. Le texte doit maintenant passer aux Etats, mais les opposants ont déjà annoncé le lancement d’un référendum.
RTS (FR)
|
|
Il est temps de raconter le monde
|
Heidimanche, la newsletter du week-end.
Découvrez Heidimanche, la newsletter qui fait le point sur les infos incontournables du week-end et annonce les grands événements de la semaine à venir. Inscrivez-vous, c’est gratuit!
|
|
Dans le radar aujourd’hui
|
Le problématique discours de Trump à West Point.
Le président américain prononcera une allocution face aux cadets de la célèbre académie militaire de West Point. Les étudiants ont dû s’isoler deux semaines en vue de la cérémonie, et une quinzaine d’entre eux ont été testés positifs au Covid-19. La direction de l’institution s’est opposée en vain à l’initiative présidentielle pour des raisons sanitaires. Le discours est attendu, alors que les rapports entre Donald Trump et les forces armées suscitent des interrogations croissantes.
Slate (EN)
|
|
Le vélo, grand gagnant de la crise.
Dans le sillage du covid, une épidémie de cyclisme s’est emparée du Royaume-Uni. Les trajets en petite reine ont doublé, des détaillants londoniens ont multiplié leurs ventes par sept et les vélos pliables s’arrachent sur internet. Cette nouvelle popularité, « occasion unique pour changer la manière dont nous nous déplaçons », s’inscrira-t-elle dans la durée?
The Guardian (EN)
|
|
Twitter veut que vous lisiez vraiment ce que vous retwittez.
Que celui qui n’a jamais partagé un article sans l’avoir lu jette la première pierre… Pour lutter contre cette tendance, qui favorise la titraille racoleuse au détriment de l’information, Twitter veut inciter ses utilisateurs à prendre réellement connaissance de ce qu’ils relaient. Intégrée dans l’application Androïd aux Etats-Unis, une nouvelle fonctionnalité suggère à l’utilisateur de lire la source de l’information, s’il retweete sans avoir consulté le lien. L’initiative a pour objectif de « promouvoir des discussions bien informées ».
Tech Crunch (EN)
|
Amazon suspend l’utilisation par la police de sa reconnaissance faciale.
La firme de Jeff Bezos a instauré un moratoire d’un an. La décision s’inscrit à la suite des manifestations et de la mort de George Floyd : par le passé, la technologie d’Amazon avait été critiquée pour ses erreurs d’identification avec les personnes noires. La mesure suit de peu celle d’IBM, qui a renoncé lundi à ses développements dans le secteur. Des villes comme San Francisco ou Cambridge, dans l’aire métropolitaine de Boston, ont déjà banni la reconnaissance faciale sur leur territoire.
New York Times (EN)
|
|
Sur Heidi.news aujourd’hui
|
|
La flying Pinto, cauchemar d’ingénieur.
En 1973, deux Américains ont combiné une Ford Pinto et un petit avion Cessna dans le but de concrétiser un vieux rêve de la science-fiction : la voiture volante. Une mauvaise idée d’anthologie, qui a précipité les deux inventeurs dans la mort.
Gizmodo (EN)
|
|
Post Scriptum des Etats-Unis, pays de la peur.
Il ne se passe pas une semaine sans que je reçoive le message inquiet d’un ami perdu de vue ou d’un cousin éloigné, soucieux de savoir comment je me porte en Amérique. Il faut dire que les nouvelles ne sont pas bonnes. Dans les Etats les plus laxistes, Covid-19 reprend du poil de la bête. Le chômage ravage villes et campagnes. Hier, les bourses du monde entier ont plongé face au futur incertain de l’économie nationale. La vague de manifestations qui secoue le pays, suite à la mort de George Floyd, achève un tableau d’Apocalypse sociale. Mais ces affaires gravissimes sont aussi des narratifs — pardonnez l’anglicisme — déformés et amplifiés jusqu’à saturation par des forces politiques fracturées et une machine médiatique qui, plus qu’ailleurs peut-être, affectionne le spectaculaire.
A suivre l’actualité de la pandémie des deux côtés de l’Atlantique, comme je le fais pour Heidi.news, on est frappé par la différence de ton. Si en Europe le covid est angoissant, aux Etats-Unis il est absolument terrifiant. Il y a quelque chose de typiquement américain dans ce rapport à la peur, qu’en son temps Michael Moore avait bien esquissée dans Bowling for Columbine. Ici plus que sur le Vieux-Continent, on prête à la frayeur des vertus pédagogiques.
Pourtant, les informations sur le virus sont les mêmes ici qu’en Suisse ou en Angleterre. C’est le traitement de la pandémie qui diverge. Soucieux d’éduquer le citoyen, le journalisme américain fait toujours le choix de l’anxiogène. Par exemple, cela se traduit avec la fréquence de certains sujets (les cas de victimes jeunes et en bonne santé sont particulièrement prisés), un goût certain pour le pathos et, souvent, une forme de défiance automatique face à tous les sujets vaguement positifs, dangereux parce que susceptibles de démobiliser les masses, comme la possible saisonnalité de l’épidémie ou les futurs vaccins.
L’actualité politique cristallise cette culture de l’effroi. Ce que vous pensez de la pandémie, du port du masque, du confinement ou des réouvertures est censé suivre la fracture entre républicains et démocrates. Mais ces lignes, tracées de manière assez nette dans les médias selon leur allégeance, sont plus floues avec les vraies gens. Heureusement, suis-je tenté de dire.
Une fois n’est pas coutume, la peur est plus présente du côté démocrate. Je soupçonne une forme de calcul politique plus ou moins conscient dans cette attitude. Avec la pandémie, il s’agit de brosser à gros traits le désastre de l’administration Trump, de porter atteinte à son bilan, de montrer à quel point ses trois ans de présidence ont mené le pays au bord du gouffre. Je ne prétendrai pas l’inverse, d’ailleurs.
Mais ces motifs partisans participent de la noirceur de l’image que l’Amérique se renvoie à elle-même, et qu’elle envoie vers le reste du monde. Comme s’il fallait un désespoir absolu pour assurer la non-réélection du locataire de la Maison Blanche. Comme s’il fallait redouter qu’un moindre rayon de Soleil ne profite, au final, à un Trump toujours soucieux de redorer son blason. La peur de la pandémie n’est pas seulement celle du virus, mais aussi celle de quatre années supplémentaires d’une présidence catastrophique. Ces craintes sont inextricablement liées.
Construite dans les médias de référence américains, cette image à la fois fidèle et biaisée du pays est celle qui, reprise dans la presse européenne, inquiète et interpelle mes amis perdus de vue et mes cousins éloignés. J’aimerais leur faire parvenir cette note rassurante. La situation est terrible, certes, pour les millions de personnes précipitées dans le gouffre du chômage de cette société sans filet. Mais les gesticulations martiales du président n’ont pas encore transformé l’Amérique en république bananière. Et puis, surtout, il y a les manifestations contre le racisme et les violences policières. Pour cette ancienne colonie esclavagiste, de pareilles occasions sont rares de se confronter à ses vieux démons. Le pays montre qu’il peut construire quelque chose même pendant les moments les plus moroses de son Histoire. C’est notable, bien plus que les scènes de chaos urbain et les devantures de boutiques éclatées. Quant à moi, je ne vais pas trop mal, merci.
|
|
|
Avenue du Bouchet 2
1209 Genève
Suisse
|
|
|