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Bonjour, c’est Serge à Genève, où Chinois et Américains se parleront demain de Fentanyl (un peu) et de taxes douanières (beaucoup).

Ce matin, je vous présente notre nouvelle Exploration, sur les graines. Elles tiennent dans le creux de la main mais déterminent la vie sur terre. C’est une histoire d’espoir et d’énergie, de jeunes paysans qui reprennent à la fois leur liberté et les traditions anciennes.

C’est réjouissant, mais cela ne couvre pas le tumulte du monde. Dans une même journée, un nouveau pape peut consacrer ses premiers mots à la paix, des dirigeants européens peuvent commémorer la fin d’une guerre, pendant qu’une autre est sur le point d’éclater entre deux puissances nucléaires et que la Russie, ivre de sa lente et sanglante progression en Ukraine, se plait à confondre l’Allemagne nazie et l’Ukraine trop libre à ses yeux.

Et surtout, il y a Gaza, «la honte de l’Occident» comme l’écrit le Financial Times cette semaine. Les souffrances insondables y suivent d’autres souffrances insondables. Nous publions ce matin un long entretien avec Sonam Dreyer-Cornut, par nos confrères de Republik. Cette infirmière clinicienne spécialisée romande a passé, tête froide, près de trois mois à diriger une équipe médicale de MSF à Gaza.

photo journaliste

Serge Michel à Genève
10.05.2025

Les graines de la révolte

Photo article

Sélection de carotte, Sativa, Rheinau, juillet 2020 | © Elisa Larvego


Après les grands-mères pour le climat,
voici les jeunes pour les graines.

Les premières, vous vous en souvenez, avaient obtenu en avril 2024 la condamnation de la Suisse pour inaction climatique par la Cour européenne des droits de l’homme (contestée ensuite par Berne).

Les seconds ne sont pas aussi organisés que leurs aînées, mais il s’agit bien d’un nouveau front de contestation, très concret, les mains dans la terre. Un peu partout, du sud de l’Italie au nord de l’Allemagne, en Afrique et en Inde, de jeunes paysans proclament leur liberté et la souveraineté des semences face à des multinationales qui ont déposé des brevets sur des grains de blé.

Consensus scientifique

Ces deux mouvements ont d’autres points communs que de faire ricaner les cyniques qui les taxent d’«idéalistes». Tous deux ébranlent un ordre établi – établi en grande partie par des considérations et des lobbys économiques – avec des arguments issus d’un consensus scientifique. Les rapports du GIEC pour les grands-mères, les études sur l’extinction de masse de la biodiversité, causée par l’activité humaine, pour les jeunes paysans.

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime que plus d’un million d’espèces sont menacées de disparition et que la grande extinction en cours n’a pas eu d’équivalent ces dix derniers millions d’années. Si les oiseaux, les mammifères, les insectes, les poissons, les arbres, les fleurs, les céréales, les coraux sont menacés, l’espèce humaine pourrait avoir du souci à se faire.

Sans graines, rien dans l’assiette

Qu’est-ce que les graines ont à voir là-dedans? Tout. Elles sont l’incarnation de la biodiversité – et de sa disparition. Sans elles, rien dans l’assiette ni dans la mangeoire des animaux que nous mangeons encore. Au cours des dernières décennies, la majorité des graines que les paysans sélectionnaient et reproduisaient eux-mêmes depuis des millénaires ont été remplacées par des semences industrielles, qu’on appelle aussi «certifiées». Elles représentent environ 80% des usages aux Etats-Unis, 50% en Europe et moins de 20% en Afrique.

Ce marché mondial des semences certifiées, qui pourrait atteindre 100 milliards de dollars en 2030, est contrôlé à 60% par quatre géants de l’agrochimie. Or ces graines homogènes sont vulnérables, notamment face au changement climatique. On voit déjà le rendement agricole baisser un peu partout sur terre: le GIEC prévoit une diminution moyenne de 5 à 15% d’ici 2050.

Un message bien tourné

Pendant ce temps, la résistance s’organise, car une autre agriculture est possible. C’est le sujet de cette enquête.

Comment nous est-elle arrivée? Il y a un an, nous recevions à notre adresse propositions@heidi.news un message étonnamment bien tourné d’une certaine Philippine Coutau. Elle disait avoir travaillé dans des fermes, n’avait encore jamais écrit pour la presse et voulait faire tous ses reportages sans prendre l’avion. Vous allez voir, cela valait la peine de lui faire confiance.

Vous n’aurez pas nos graines / Au cœur de la lutte contre les semences industrielles, c’est à la fois une Exploration en ligne, dont deux épisodes sont déjà parus (voir ci-dessous) ainsi que le prochain numéro, le 26e, de notre revue trimestrielle. Elle sera envoyée en juin aux abonnés et pour les autres, elle peut déjà être commandée sur notre site.

Pré-commande de la revue imprimée
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Compte Instagram de Jonas Frei | DR

Les graines, c’est aussi une source d’inspiration majeure pour les artistes. Les photographes, bien sûr, dont ceux que nous avons retenus pour le portfolio de la revue: Elisa Larvego, Christian Lutz et Serge Goumaz, qui ont travaillé pour l’exposition itinérante «Semenciers, semencières – Au nord et au sud, un artisanat du vivant», créée par Les Jardins de Cocagne, Solidarité Nord et Sud et Semences de pays. Mais aussi l’architecte paysager de Schaffhouse, Jonas Frei, qui aligne des noix ou des grains de maïs à la façon des cabinets de curiosités du siècle dernier. Sans oublier l’art visuel, avec notamment l’exposition en cours à Espace Muraille à Genève, imaginée par la commissaire Valentina Locatelli. «L’herbier de la mémoire», ce sont les œuvres de Laura De Bernardi, Gergana Mantscheva et Laura Sánchez Filomeno présentées comme s’il s’agissait de spécimens hétérogènes empruntés à différents herbiers dans le but de comparer et d’étudier trois collections botaniques géographiquement et culturellement distinctes, mais néanmoins apparentées.

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Vous n'aurez pas nos graines, premiers épisodes

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Troncs d’oliviers dans les Pouilles en décembre 2020, dévastés par la Xylella Fastidiosa et prêts à être arrachés. | Alamy / Flavio Massari

Avec ceux qui sèment l’utopie sur les terres dévastées d’Italie. L’histoire commence par un film qui transporte notre reporter et apprentie agricultrice dans un village des Pouilles. Déjà dépeuplée par l’exode rural, la région vit une tragédie: une bactérie a ravagé les oliviers, érigés ici en monoculture. Mais la résistance s’organise, au sein de la Casa delle agriculture. Pour cela, il faut des graines. Des graines paysannes, celles que l’industrie a rejetées.

1er épisode (libre accès)
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Semailles participatives en Erythrée en 2000. | Salvatore Ceccarrelli, courtoisie

Quand la révolution des graines passe par le Sud. Pourquoi tous les épis de blé d’un champ sont-ils identiques? Parce que l’industrie, le capitalisme et les engrais chimiques s’en sont mêlés, privant les paysans de leur savoir-faire ancestral. Or ce modèle s’épuise et les récoltes sont fragiles. Rencontre avec le généticien Salvatore Ceccarelli, qui fait partie de ceux qui veulent inverser le mouvement. Dans le Croissant fertile, il a développé des populations évolutives de semences qui rendent le pouvoir aux gens de la terre.

2e épisode (pour abonnés)

«Je ne sais pas comment vont faire les gens pour survivre»

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Des femmes tentent d’obtenir une ration de nourriture à Khan Younes, au sud de la bande de Gaza, le 9 mai. (AP Photo/Abdel Kareem Hana)

Le témoignage d’une reponsable médicale de retour de Gaza. Sonam Dreyer-Cornut, infirmière clinicienne spécialisée diplômée de l’UNIL, a coordonné une équipe médicale de Médecins sans frontières à Gaza pendant dix semaines, à compter de fin février 2025. Elle est rentrée en Suisse début mai et a accepté de témoigner auprès du média alémanique Republik, dont Heidi.news est partenaire. Nous publions l’entretien in extenso.

Heidi.news (accès libre)

Il est temps de raconter le monde

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🕵️ Découvrez nos enquêtes. Retrouvez nos enquêtes sur les réseaux sociaux de la migration, le trafic maritime à la Saya de Malha, le démantèlement de l’Etat américain par les barons de la tech, et des dizaines d’autres à découvrir sur notre site. Bonne lecture!

Voir les enquêtes

De bonnes lectures pour le week-end

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Pitch Comment pour Heidi.news

Le Pitch de la semaine. Ce sera donc un pape américain, au plein sens du terme. A 69 ans, c’est le cardinal Robert Francis Prevost qui émerge de la chapelle Sixtine avec un nouveau nom, celui de Léon XIV. Natif de Chicago, membre de l’ordre de saint Augustin, le successeur de François (qui l’avait fait cardinal) a passé la majeure partie de sa carrière au Pérou, pays dont il possède la nationalité et auquel il a fait référence dans son premier discours pontifical.

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Aviel Cahn (Grand Théâtre, Nicolas Schopfer)

La dernière saison d’Aviel Cahn au Grand Théâtre de Genève. Aviel Cahn, qui partira ensuite pour le Deutsche Oper de Berlin a présenté le programme 2025-2026 du Grand Théâtre de Genève. Pour sa dernière saison, le directeur a misé sur des opéras parmi les plus connus (Tannhaüser, Madame Butterfly) et sur quelques raretés, à l’image de «200 Motels» de Frank Zappa, qui conclura son mandat. Un grand coup, comme celui qui marquait son arrivée en septembre 2019, «Einstein on the Beach», un opéra de Philip Glass dans une mise en scène de Daniel Finzi Pasca. Il avait été en juin 2019 le rédacteur en chef invité d’un Point du jour de Heidi.news.

RTS (FR)

La première guerre de drones entre puissances nucléaires a éclaté en Asie du Sud. Jeudi, l’Inde a accusé le Pakistan d’avoir lancé des vagues de drones et de missiles sur trois bases militaires situées en territoire indien et dans le Cachemire administré par l’Inde, allégation qu’Islamabad a rapidement démentie. Le Pakistan a affirmé avoir abattu 25 drones indiens au cours des dernières heures. Delhi est resté silencieux. Les experts estiment que ces attaques marquent une nouvelle phase dangereuse dans cette rivalité vieille de plusieurs décennies, les deux parties échangeant non seulement de l’artillerie, mais aussi des armes sans pilote à travers une frontière instable.

BBC (EN)

Tout le monde triche. Un regard froid de l’état de l’IA dans le monde universitaire, qui donne à réfléchir. Depuis le lancement de ChatGPT en 2022, l’utilisation par les étudiants pour générer des articles entiers est devenue banale. Le trafic sur le site chute d’ailleurs pendant les vacances d’été. Un professeur est convaincu que l’écriture «devient rapidement une option artistique anachronique, comme la vannerie». Mais peut-être l’enseignement universitaire était-il dévalorisé bien avant que les chatbots n’y participent?

New York (EN)

Israël censure la presse comme jamais. En 2024, la censure militaire israélienne a interdit la publication de 1’635 articles et en a partiellement expurgé 6’265 autres, dans le cadre d’un assaut bien plus large contre la liberté de la presse. En moyenne, le bureau de la censure est intervenu dans 21 reportages par jour l’an dernier, soit plus du double du pic précédent d’environ 10 interventions quotidiennes durant la dernière guerre à Gaza en 2014 et plus de trois fois la moyenne de 6,2 par jour en dehors des périodes de guerre.

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