Bonjour, c’est Florent dans l’Est ukrainien, où je me remets du choc de la mort d’un collègue et excellent photographe, Antoni Lallican. Je vous en parle dans cette édition.

Au menu du jour, la démission du Premier ministre français qui plonge l’Hexagone dans l’incertitude, Donald Trump qui défie la justice et des microcomposants suisses dans les drones russes.

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Florent Vergnes à Kyiv
07.10.2025

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Les infos que j'ai retenues pour vous

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Le Premier ministre français sortant, Sébastien Lecornu, à l’Hôtel Matignon à Paris, le 6 octobre 2025. Stephane Mahe/AFP

Le Premier ministre français démissionne. C’est un record. Parmi tous les chefs de gouvernement éphémères qui se succèdent depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en 2024, Sébastien Lecornu, a mis la clé sous la porte 14 heures à peine après la formation de son gouvernement et 27 jours de mandat. L’Élysée lui a confié une mission d‘«ultimes négociations» d’ici mercredi soir pour stabiliser la droite éclatée. En cas d’échec, Macron pourrait envisager une nouvelle dissolution. Cette crise, la plus grave depuis 1958, a fait chuter le CAC 40 de 1,36 % et inquiète l’UE.

Le Devoir (FR)

Donald Trump prêt à invoquer le «Insurrection Act». Alors que les manifestations contre les abus des Services de l’Immigration (ICE) continuent à Portland, le président américain à brandit hier la menace d’invoquer cette loi qui l’autorise à déployer l’armée où bon lui semble. La Maison-Blanche a déjà mobilisé une centaine de membres de la garde nationale dans cette ville démocrate de l’Oregon, malgré deux ordonnances d’une juge fédérale, selon qui il n’y a «pas d’insurrection ni de menace pour la sécurité nationale». Les démocrates ont fustigé un «abus de pouvoir» de l’exécutif.

New York Post (EN)

Israël expulse 171 militants de la flottille pour Gaza. Ressortissants de 19 pays, 161 de ces militants ont atterri hier à l’aéroport international d’Athènes, dont la Suédoise Greta Thunberg. Huit Helvètes relâchés par Israël dimanche ont affirmé avoir été victimes d’exactions et de «tortures». «C’étaient des heures sous le soleil, à genoux», a expliqué l’écrivain Vianni Bianconi ce weekend. En détention, «on était traités comme des animaux. Après deux jours et demi, ils nous ont dit qu’il fallait boire l’eau des toilettes [sous] des cris et des menaces». Il y a toujours dix Helvètes incarcérés à la prison de Ktzi’ot, dans le sud d’Israël.

RTS (FR)

Il est temps de raconter le monde

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Dans mon radar aujourd'hui

La Cour suprême face à un choix. La plus haute juridiction américaine examinera aujourd’hui la constitutionnalité d’une loi du Colorado interdisant les thérapies de conversion (des traitements pseudoscientifiques visant à changer l’orientation sexuelle d’une personne) pour les mineurs LGBT+. Cette loi, en vigueur depuis 2019, est contestée par une conseillère psychologique, Kaley Chiles, qui invoque la liberté d’expression garantie par le premier amendement. Déboutée en première instance et en appel, elle a saisi la Cour suprême à majorité conservatrice. Le Colorado défend son interdiction, soulignant les risques psychologiques graves causés par ces pratiques.

CNN (EN)
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Roman, 17 ans, étudiant, dans les vestiaires du club de boxe où il s’entraîne, à Kramatorsk (oblast de Donetsk, Donbass, Ukraine), le 10 octobre 2023. ANTONI LALLICAN/HANS LUCAS

Ca m'est arrivé cette semaine

Vendredi, rentré du front, épuisé, je m’apprête à prendre une douche. Puis un message d’un contact militaire tombe : «Un journaliste français a été tué du côté de Konstyantinivka», dans le Donbass. C’est le choc. Antoni Lallican, photojournaliste talentueux, n’est plus. Il a été fauché, à 37 ans, vers Droujkivka, dans l’est de l’Ukraine, par un drone FPV russe.

Son ami et collègue qui l’accompagnait, le photojournaliste ukrainien George Ivanchenko, a quant à lui été gravement blessé et sera amputé de la jambe.

Ancien étudiant en pharmacie, Antoni avait décidé de changer de vie à la fin des années 2010 pour devenir photographe.
Je ne le connaissais pas personnellement, mais j’aimais regarder passer ses photos, pleines d’intimité, pleines d’amour pour ce pays. L’Ukraine était le terrain qu’il connaissait le mieux, d’après ses amis. Et ça se sent à travers ses clichés.

Je préviens un ami photographe qui connaît Antoni, qui buvait des bières à la santé de son pacs, à Paris, moins d’un mois plus tôt. Il est sidéré, lance un flot de «putain» d’une voix éteinte, en boucle. Il m’explique que, durant cette soirée dans son appartement, Antoni lui avait confié qu’il commençait à se poser des questions sur la couverture de l’Ukraine, la faute aux drones explosifs FPV qui pullulent maintenant sur tout le front, parfois jusqu’à 30 km, rendant le travail extrêmement dangereux. De petites merdes volantes qui filent à plus de 200 km/h, avec, au bout, un soldat russe qui vous voit, vous vise, vous poursuit. Comme autant de petits snipers dans les airs, invisibles, au bruit irritant. Le genre d’engin qui fait que je sursaute à chaque zonzon de moustique depuis un an maintenant.

Au téléphone, ses amis proches me bombardent de questions, tentent de savoir ce qu’il s’est passé, de comprendre. Mais je n’ai aucune réponse. Depuis plusieurs mois, faire notre travail de journaliste sur le front ukrainien est devenu presque impossible. Toutes les connaissances que j’ai emmagasinées sur cette guerre en trois ans, sont obsolètes à cause de l’omniprésence des drones.

Le danger, qu’avant une oreille aguerrie savait déceler, est maintenant totalement silencieux. Plus d’explosion d’artillerie, plus de sifflement d’obus. Seulement un fin zonzon, ou parfois même rien du tout, qui fini par vous péter à la gueule. «La guerre du XXIe siècle est devenue sale», disait un ami soldat. «Moi qui pensais que j’allais mourir l’arme à la main, dans un assaut final digne d’un film, je sais que je crèverai seul comme un con dans ma voiture, explosée par un drone». Une phrase dont le cynisme résume assez bien la situation actuelle.

Inévitablement, la disparition violente d’Antoni me rappelle la perte de mon ami Arman Soldin, tué le 9 mai 2023 à Tchassiv Iar, non loin de là, par des roquettes russes. Ce même état de sidération. Ce même réveil forcé face à la réalité de la guerre et du danger que courent les journalistes. Ce même vide, quand on se couche dans son lit, à regarder bêtement le plafond.

Lui aussi portait un gilet pare-balles clairement identifié «PRESS», mais cela n’a pas empêché la personne de l’autre côté du front d’appuyer sur la détente. Et on continue d’espérer, de toutes nos forces, un semblant de justice, que la guerre a rendu illusoire.

Antoni, «que la terre te soit légère», comme ont dit dans ce pays que tu chérissais.

Mon labo slave

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Un soldat prépare des filets pour se protéger contre les attaques de drones le long d’une route près d’Oleksandrivka, le 6 octobre 2025. Ed JONES/AFP

Des composants suisses dans les drones russes. Volodymyr Zelensky a dénoncé hier, la présence de plus de 100’000 composants étrangers dans les 549 drones et missiles russes utilisés lors des frappes massives du 5 octobre. Ces attaques ont tué cinq personnes et causé des coupures d’électricité. Zelensky a pointé du doigt des microcontrôleurs suisses et des microprocesseurs britanniques dans les drones, ainsi que des technologies américaines dans les missiles Iskander et Kinzhal, mais aussi des composants japonais et allemands. Il a exhorté les pays concernés à renforcer les contrôles sur leurs exportations et leur aurait transmis des propositions concrètes à cette fin.

The Independent (EN)

Moscou intercepte une des plus grandes attaques de Kyiv. La Russie a neutralisé 251 drones ukrainiens hier, un record. En Crimée, 40 de ces appareils ont été abattus, dont 62 au-dessus de la mer Noire et cinq sur la mer d’Azov. Une raffinerie pétrolière russe a été touchée, blessant deux personnes, et 5’400 habitants sont toujours sans électricité. L’Ukraine rapporte elle que 116 drones russes ont été lancés, avec des dégâts à Tchernihiv, dans le nord, et un mort à Kherson, dans le sud. Avec l’arrivée de l’hiver, Moscou intensifie ses frappes sur le réseau électrique ukrainien, notamment dans les territoires frontaliers au nord. En réponse, Kyiv tente de toucher le nerf économique russe: le pétrole.

Radio France Internationale (FR)

En Ukraine, la guerre des institutions met en lumière la corruption. La guerre est ouverte entre le Service de sécurité d’Ukraine (SBU) et le Bureau national anticorruption (NABU), qui s’affrontent à coups de raids, arrestations et enquêtes croisées. Tout commence par une loi de juillet 2024, votée sous l’égide de Zelensky, subordonnant le NABU au procureur général – partiellement annulée sous pression européenne – pour freiner des enquêtes sur des proches du président ukrainien. À partir de là, le SBU arrête deux détectives du service rival, l’un pour «aide à l’agresseur russe» l’autre pour «haute trahison». En riposte, le NABU a inculpé en septembre l’ex-chef cyber du SBU pour enrichissement illicite. Le tout saupoudré d’accusations mutuelles d’agissements prorusses. Une histoire qui met en lumière des problèmes de corruption systémique en Ukraine, hérités de l’Union soviétique, dont seul Moscou tire vraiment profit.

Kyiv Independent (EN)

Heidi.news c'est...

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Une femme fuit les combats à Khartoum avec ses affaires en baluchon, le 19 avril 2023, quatre jours après que la milice des FSR a lancé l’assaut sur certaines parties de la ville. | Keystone / EPA / Stringer

La nuit où Khartoum a basculé dans le pillage et la guerre. Le renversement du gouvernement despotique d’El-Béchir en 2019 avait inauguré une nouvelle ère pleine de promesses au Soudan. Tout s’est écroulé quatre ans plus tard, quand l’armée régulière et les Forces de soutien rapides (FSR), les deux principaux groupes armés derrière la révolution, ont commencé à s’entredéchirer pour le contrôle du pays. Récit d’une capitale qui chavire du jour au lendemain.

Heidi.news (FR)
En direct de la Trumposphère
Chicago? Une «zone de guerre».

C’est ce qu’estime la ministre de la Sécurité intérieure, Kristi Noem, alors que Donald Trump a signé samedi un décret pour envoyer 300 gardes nationaux dans cette ville de l’Illinois pour «protéger les agents et biens fédéraux», selon la Maison-Blanche.

Le maire, Brandon Johnson, qui a eu l’outrecuidance de dénoncer des mesures «anticonstitutionnelles», s’est attiré les foudres de la ministre.

«Sa ville est une zone de guerre et il ment pour que les criminels puissent y entrer et détruire la vie des gens», a-t-elle martelé, tout en demi-mesure, assurant sans broncher que des gangs, cartels et autres «organisations terroristes connues» offrent des primes aux manifestants pour se dresser contre les agents de la police de l’immigration.

News 18 (FR)

Votre correspondant. Plus ou moins journaliste, plus ou moins photographe, j’aime les pancakes et les bonnes histoires. Historien de formation, aussi organisé que l’armée russe et ponctuel qu’un bus malien, je fuis les lourdeurs de l’administration dans les pays où il n’y en a plus. Après douze palus et trois typhoïdes en Afrique, je redécouvre les saisons en Ukraine.

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