Bonjour, c’est Alex Ray Chef à Genève. C’est pas mon vrai nom, vous allez comprendre pourquoi.
Après m’être lancé dans une carrière un peu risquée, j’ai dû reprendre mes études à l’Université du Crime à Champ-Dollon, un cursus de cinq ans. J’en suis sorti multi-diplômé en 2017 avant de m’orienter vers des activités honnêtes, moins lucratives.
Depuis une semaine, la prison genevoise est en ébullition. Chaleur étouffante dans les cellules et surtout pénurie de gardiens, ce qui limite les parloirs et les activités, tout ce qui sert de soupape. Ce samedi de canicule, ça pourrait bien péter. Et si ce n’est pas aujourd’hui, ce sera demain.
J’ai écrit pour Heidi.news un récit à ma façon sur mes années à Champ-Dollon. Je ne savais pas, ce faisant, que la situation allait de nouveau dégénérer, la police intervenir, les détenus refuser d’intégrer leurs cellules, des bagarres avoir lieu.
En fait, rien n’a changé depuis mes années d’étudiant. Qui peut en dire autant? |
Aux grands maux les petites mesures
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Mur d’enceinte de l’université, adapté d’une photo Keystone (Martial Trezzini) par l’auteur de ces lignes.
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Ah, Champ-Dollon…
Imaginez une auberge de jeunesse du trop-plein, où la jeunesse n’est pas très joyeuse et où les chambres triples sont la norme (pour le même tarif). Oui, c’est un peu l’AirBnb de la surpopulation: on réserve une cellule, on se retrouve à trois ou quatre, sans avoir demandé l’option colocation.
Plus de 700 invités dans un espace prévu pour 370: ambiance garantie! Même les sardines en boîte trouvent ça exagéré. Pas de hammam ni de jacuzzi, mais des douches collectives où l’intimité est un vague souvenir. L’hygiène? Un concept expérimental. Les maladies contagieuses font leur festival annuel, la varicelle et la galle ont leur abonnement VIP.
Les détenus en viennent à rêver d’un séjour à l’hôpital, juste pour changer d’air.
Tous prisonniers
Les gardiens de Champ-Dollon, ces héros fatigués, ce sont un peu les marins du Titanic: ils écopent, ils courent, ils essaient de calmer tout le monde, en jonglant avec les heures sup’ et les arrêts maladie. Leur rêve secret? Un open space avec vue sur la mer, loin des cris et des portes qui claquent. Je me suis laissé dire que ces derniers jours, ils ne sont pas mécontents que les détenus s’agitent: si ça pète, ils auront enfin du renfort.
La police est intervenue lundi et patrouille désormais à proximité de la prison, prête à y retourner. Ca a calmé les détenus pour un temps, mais ce samedi, premier jour de l’été, sera aussi un jour des hautes températures. Et le béton brûlant sans la clim, croyez-moi sur parole, ça vous scie les nerfs comme rien d’autre. D’autant que les matons sont en nombre insuffisant, ce qui limite les visites des avocats et des familles, l’accès aux soins et aux activités.
La recette du fiasco
Voici donc la recette du fiasco. Prenez une pincée de décisions politiques à court terme, ajoutez une bonne dose de manque d’investissement, saupoudrez de promesses non tenues, et mélangez le tout avec une administration qui avance à la vitesse d’un escargot fatigué. Vous obtenez la situation actuelle: un établissement surchargé, des détenus à bout, du personnel épuisé et des politiques qui jouent à «ça ira mieux demain».
Evidemment, du côté de l’Etat, on jure ses grands dieux qu’on fait ce qu’il faut: «On va régler le problème, promis!» Alors je vous traduis: on déplace trois détenus ici, on en transfère deux là, et on espère que ça ira mieux. Pour la sécurité, on multiplie les contrôles, on durcit les règles et on distribue les punitions comme des sucreries à Noël. Sauf qu’il fait chaud.
Résultat? Des barreaux un peu plus serrés aux fenêtres, mais aucun effet sur la gestion des conflits, et encore moins sur la réinsertion des détenus.
Une poudrière sans soupape
Depuis plus d’une semaine, les mouvements collectifs de protestation, les refus de réintégrer les cellules ou les actes de violence sont des conséquences directes de la politique carcérale défaillante et de l’inertie de l’administration. Les rapports mentionnent davantage de tentatives de suicide et d’automutilations, symptômes d’une détresse psychologique profonde liée à la surpopulation et à l’absence de perspectives.
Tant qu’on ne fait pas le choix politique fort de désengorger la prison, d’établir une politique pénale cohérente sur la détention préventive, d’améliorer les conditions de vie des détenus et de repenser la mission de l’établissement, les mêmes causes produiront les mêmes effets. Ce n’est pas pour rien que les crises se succèdent depuis plus de dix ans.
Souvenez-vous des émeutes de 2014: je les ai vécues de l’intérieur et je les raconte dans un épisode à venir de mon récit. Je vous invite à vous y plonger, ce n’est pas tous les jours qu’on peut visiter une prison sans risquer sa peau.
Une Exploration à découvrir sur Heidi.news
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Entrée de l’université, adapté d’une photo Keystone par l’auteur de ces lignes.
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Pendant ce temps sur Heidi.news
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Photo d’illustration dans un call center désaffecté, par Régis Golay.
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Des chevaux en train de paître devant le fjord de Hvalfjoerdur, près de Reykjavik. La capitale et le sud de l’île sont particulièrement exposés au surtourisme. | Keystone / AP Photo / Virginia Mayo
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Pitch Comment, pour Heidi.news
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Le 13 juin dernier, c’est possiblement une troisième Guerre du Golfe qui a débuté.
Obsédé par l’Iran depuis toujours, Benyamin Nétanyahou a profité d’un moment stratégique favorable pour lancer une opération militaire prévue de longue date, juste à temps pour empêcher les Américains de conclure un nouveau deal avec la République islamique. Avec un autre avantage: continuer à focaliser son opinion publique sur des opérations extérieures, consensuelle en l’espèce, alors que lui-même est sous le coup de lourds procès pour corruption et que son assise politique est précaire.
Personne n’a jamais cru que Nétanyahou avait le sort des otages israéliens du Hamas à cœur, bien sûr, mais force est de constater que les mollahs ont été pris par surprise. De l’aveu de plusieurs hauts responsables du régime, l’Iran ne s’attendait pas à ce qu’une telle opération soit déclenchée alors que les négociations étaient en cours avec Washington, voire sur le point de déboucher. C’était sous-estimer combien Nétanyahou peut être retors, et combien Trump peut être versatile — ou pusillanime.
L’erreur est cher payée, puisque la République islamique a perdu une bonne partie de ses cadres militaires, que ses capacités de lancement de missiles ont été largement entamées, que le ciel iranien est désormais sous contrôle d’Israël, et que la survie du Guide suprême semble suspendue à un fil.
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Il est temps de raconter le monde
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📖 Ozempic, la révolution de l’obésité.
Issu de l’Exploration Minceur sur ordonnance publiée en ligne sur Heidi.news, ce livre aux éditions Odile Jacob prolonge l’enquête de Fabrice Delaye, avec une préface de Patrick Aebischer.
Comment un médicament antidiabétique est-il devenu un coupe-faim star, symbole d’une nouvelle ère dans la lutte contre l’obésité ?
Entre espoir médical, engouement mondial et risques sous-estimés, cette enquête décrypte un phénomène qui bouleverse à la fois la médecine, les marchés… et notre rapport au corps.
Profitez d’un rabais de CHF 6.- avec le code promo OZEMPICHD (réservé aux lecteurs et lectrices de Heidi.news).
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De bonnes lectures conseillées par Heidi.news
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L’incroyable infiltration du Mossad en Iran. Dans ce long et passionnant article, le quotidien de la droite française relate comment le Mossad a préparé le terrain pour l’opération militaire surprise du 13 juin. Le service de renseignement israélien, généralement considéré comme l’un des meilleurs au monde, a réussi un véritable tour de force, tant du point de la qualité du renseignement que de la mise en œuvre de moyens d’action complexes tels que l’assassinat ciblé, le guidage de bombes, le déploiement de drones d’attaque, et on en passe.
Le Figaro
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«Regime change» en Iran: la stratégie à la George Bush de Nétanyahou. Spécialiste du Moyen-Orient, la politiste Myriam Benraad souligne les parallèles qui existent entre le discours volontariste du premier ministre israélien à propos de l’Iran et la vision claironnée en leur temps par les néo-conservateurs de l’entourage de George W. Bush, qui affirmaient qu’en renversant le régime tyrannique de Saddam Hussein en Irak, ils ouvriraient dans l’ensemble de la région une nouvelle page, démocratique et constructive. Entretien.
The Conversation (France)
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Comment des faucons israéliens projettent le grand partage de l’Iran. Dans son éditorial du 18 juin, le quotidien conservateur The Jerusalem Post appelle Trump à former une coalition au Moyen-Orient pour organiser la partition de l’Iran. Si elle ne reflète pas la position officielle du gouvernement ni de l’establishment israélien, cette publication, remarquée aux États-Unis, signale la désinhibition stratégique d’une partie des faucons en Israël, confortés par les succès tactiques d’Am Kalavi : aucune option ne saurait désormais être écartée.
Le Grand Continent
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Les braves Européens: «Nous appelons l’Iran à reprendre la voie de la diplomatie». Nous irgnorons comment Abbas Araghchi, le ministre iranien des affaires étrangères, a pu arriver hier à Genève. Est-il sorti d’Iran en avion, malgré les frappes israéliennes sur les aéroports (et tout ce qui bouge) ou a-t-il dû aller par la route jusqu’en Arménie ou en Turquie pour prendre l’avion? Toujours est-il qu’il était là, et que ses trois homologues, allemand, français et britannique, ont pu lui faire la morale pendant que Donald Trump lâchait, de son côté que ces trois là n’étaient pas utiles: «L’Iran ne veut pas parler à l’Europe. Il veut nous parler à nous. L’Europe ne va pas pouvoir aider sur ce sujet», a-t-il déclaré à son arrivée à Morristown, dans le New Jersey. Le Temps fait le récit de la journée à l’hôtel Intercontinental.
Le Temps
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Singularité harmonieuse ou stupidité pernicieuse? Sur son blog, Sam Altman, patron d’OpenAI, décrit sa vision du futur de l’humanité. Des IA plus intelligentes que l’homme, des robots qui construisent des robots, un enrichissement accéléré du monde, et seulement quelques petits obstacles à surmonter, au plan énergétique ou des valeurs fondamentales. «Puisse notre trajectoire vers la superintelligence être fluide, exponentielle et sans accroc», conclut le surdoué de la tech, dont le manque d’épaisseur historique et psychologique laisse sans voix.
Blog de Sam Altman (EN)
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Avenue du Bouchet 2
1209 Genève
Suisse
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