Les infos que j'ai retenues pour vous

Les Syriens ont célébré la nouvelle sur la place des Omeyades. Crédits: Keystone / AP / OMAR SANADIKI

Trump lève les sanctions contre la Syrie. Il aurait pris cette décision «pour leur donner une chance de grandeur», a-t-il déclaré hier soir, sous les applaudissements nourris de Mohamed Ben Salmane, au terme du premier jour de sa fructueuse visite d’Etat en Arabie saoudite. Il met ainsi fin à plus de 50 ans de punitions américaines. En contrepartie, il lorgne sur le pétrole du pays, qui se situe dans le nord-est du pays. Ce n’est certainement pas un hasard si cette annonce tombe au lendemain de la dissolution du PKK, le groupe armé kurde qui opère de l’autre côté de la frontière turque.

Trump encaisse les chèques en Arabie saoudite. Le président américain a été accueilli hier en grande pompe à Ryadh, à l’occasion de sa première visite d’Etat, comme il y a huit ans. Accompagné par Elon Musk, Sam Altmann et des dizaines d’autres géants de l’économie américaine, il a signé pour 600 milliards de dollars d’accords. Au menu: de l’intelligence artificielle, de l’énergie, beaucoup de militaire, mais aussi du spatial. Les prochaines étapes de sa tournée au Moyen-Orient auront lieu aux Émirats arabes unis et au Qatar.

Les résidents du nord de Gaza priés de décamper. Hier soir, l’armée israélienne a appelé la population à quitter immédiatement certaines zones septentrionales de la bande. Plus tôt dans la journée, lors d’une rencontre avec des réservistes, Benyamin Nétanyahou a annoncé l’entrée imminente de Tsahal sur le territoire. Il s’agit de l’opération «Chariots de Gidéon», qui vise à occuper militairement Gaza tout entière, à raser les bâtiments encore debout, et à masser la population à Rafah avant un éventuel déplacement vers les pays limitrophes.

Il est temps de raconter le monde

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Dans mon radar aujourd'hui

Première rencontre entre Charaa et Trump. Les deux dirigeants vont se serrer la main aujourd’hui en Arabie saoudite, puis s’entretenir brièvement. C’est la consécration d’intenses efforts diplomatiques pour le président syrien, qui se trouve pourtant encore sur la liste antiterroriste américaine depuis qu’il a combattu avec Al-Qaïda en Irak. Il peut également remercier le coup de pouce de ses alliés Mohamed Ben Salmane et Recep Tayyip Erdogan, qui ont apporté un soutien décisif.

Make Syria great again! Il est 19 heures, hier à Damas, quand les bruits de balles commencent à résonner dans le ciel, suivis de klaxons. Encore un mariage, me dis-je distraitement. Puis mon amie, une chercheuse française spécialiste de la région, commence à recevoir des appels de ses amis syriens. Ils sont en pleurs. De joie. Je comprends alors que les sanctions sont levées, un jour avant la probable rencontre entre Charaa et Trump.

Ni une ni deux, je file à la place des Omeyades, où se déverse une foule compacte, dans une bronca de klaxons et une marée de drapeaux vert-noir-blanc. Des familles, des groupes d’amis, des personnes seules, ce beau monde est issu de toutes les confessions, y compris les Druzes et les alaouites récemment victimes de massacres – ce qui avait d’ailleurs découragé l’Union européenne de lever ses sanctions. Tout le monde revient sur le lieu où ils ont célébré la chute du régime, il y a désormais six mois.

«Donald Trump est le meilleur, je l’aime! Allah Wakbar!», crie un jeune homme, suivi par des dizaines d’autres. La scène est irréelle: des barbus vêtus de djellabas, brandissant un drapeau blanc sur lequel est écrite la profession de foi musulmane, en train de chanter les louanges de Donald Trump entre deux hymnes révolutionnaires syriens et quelques slogans à la gloire de l’Arabie saoudite et de la Turquie, qui ont encouragé le président américain à prendre cette décision.

Mohamed, 37 ans, agite un drapeau saoudien. «Je vis à Riad, et je suis revenu en Syrie il y a deux semaines, pour la première fois depuis la chute du régime. Je ne sais pas pourquoi, mon cœur m’a dit de prendre le drapeau, qu’il y aura quelque chose à célébrer avec mon peuple. C’est fou!».

Mon labo arabe.

Les affrontements dans la capitale syrienne ont fait au moins six blessés et un mort. Crédits: Keystone / AP / Yousef Murad

Des groupes armés s’affrontent à Tripoli. Lundi soir, de violents combats ont éclaté dans le sud de la capitale libyenne, tuant le chef d’une importante faction armée. Les autorités de Tripoli, dirigées par le premier ministre Abdulhamid Dbeibah et reconnues par les Nations Unies, ont annoncé avoir repris le contrôle de la situation. Depuis près de dix ans, elles font face à une administration rivale dans l’est du pays, menée par le Maréchal Haftar, ainsi qu’à une myriade de milices affiliées à l’un ou l’autre régime.

Le Soudan coupe les ponts avec les Emirats arabes unis. La ville de Port-Soudan, bastion des forces gouvernementales, est bombardée sans relâche depuis la semaine dernière par les drones des rebelles des Forces de soutien rapide (RSF). L’armée officielle accuse les Émirats arabes unis de financer ces drones chinois bon marché. Le Soudan a décidé de couper les ponts avec le pays du Golfe, qui joue un rôle majeur dans le secteur bancaire et minéral, notamment dans les mines d’or.

Accord entre Damas et Ankara sur le gaz. Ici à Damas, tout comme dans le reste de la Syrie, l’électricité gouvernementale n’approvisionne les foyers que 4 à 5 heures par jour. Seuls les ménages bénéficiant d’une génératrice ou de panneaux solaires ont du courant en continu. Pour commencer à sortir le pays des ténèbres, la Turquie s’engage d’ici trois mois à acheminer six millions de mètres cubes de gaz naturel par jour, via un pipeline qui relie les deux nations, afin d’alimenter une centrale électrique à Alep.

Une raison d'espérer

Al Jazeera à nouveau diffusé en Cisjordanie. En début d’année, l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas avait décidé, tout comme Israël quelques mois plus tôt, d’interdire la chaîne qatarie. Elle l’accusait de «désinformation», d’«incitation à la sédition» et d’«ingérence», tandis que ses forces de sécurité menaient des opérations violentes et controversées à Jénine. Cette décision avait choqué non seulement en Cisjordanie, mais également à l’international, Al Jazeera étant généralement reconnue pour son exigence journalistique. Lundi, le chef du bureau de la chaîne à Ramallah a annoncé la levée de l’interdiction.

«Il me connaît bien (…). Je l’aime beaucoup. Je l’aime trop. C’est pour ça qu’on se donne autant, tu comprends?»

Donald Trump expliquait hier, en ces termes très élémentaires et personnels, l’accord monstre ratifié avec le prince hériter des Saoud, Mohammed bin Salman. Avec l’auteur présumé de The Art of the Deal, la géopolitique mondiale finit par se réduire aux humeurs d’une poignée d’hommes puissants, à leurs affaires, leur carnet d’adresses et leurs petits papiers. Mirage passager dans les sables de la péninsule arabique ou prémisse d’un nouvel ordre mondial?

Votre correspondant. Aimant à me définir comme un «arabe raté», je me suis installé au Caire il y a un an et demi pour enfin apprendre cette langue que mon père tunisien ne m’a jamais transmise. Avant cela, j’ai réalisé des explorations pour Heidi.news et officié chez Le Temps pendant deux ans. Ces jours, je suis en Syrie pour du reportage.