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Bonjour, c’est Kylian pour votre Point fort du jour.

Aujourd’hui, je vous parle de l’açai, cette petite baie brĂ©silienne. Vendue comme un «superfruit», elle fait fureur Ă  GenĂšve.

Ce qui nous amĂšnera Ă  parler de superaliments, de peuples autochtones et de quinoa.

Je vous dis tout.

photo journaliste

Kylian Marcos, GenĂšve

17.05.2023

Avant d'entrer dans le vif

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L’açai, «superfruit» brĂ©silien qui s’attaque au marchĂ© suisse

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Un bol d’açai tel qu’il est vendu dans les commerces occidentaux I © Marco Verch / Flickr

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L’açai rencontre un franc succĂšs Ă  GenĂšve: au moins une dizaine de commerces le proposent Ă  la vente, souvent sous forme de smoothie pourpre trĂšs instagrammable. C’est plus qu’à Lausanne, BĂąle et Zurich rĂ©unies.

Mais cette baie ne pousse pas en Suisse. Ce fruit nous vient directement des palmiers de la forĂȘt amazonienne, au BrĂ©sil surtout. A GenĂšve, c’est la communautĂ© brĂ©silienne qui a importĂ© la tendance.

La vieille histoire d’un aliment traditionnel.

Historiquement, l’açai fait partie de l’alimentation des peuples autochtones amazoniens.

Un mouvement de reconnaissance de ces peuples, dans le cadre du sommet de Rio en 1992, a popularisé cette baie. Nathalie Cialdella, agronome et chercheuse au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad):

«Toutes les personnes sensibles Ă  l’environnement ont alors vu dans la consommation de l’açai une maniĂšre de soutenir les populations autochtones»

De 1000 hectares en 1994, la culture de l’açai reprĂ©sente dĂ©sormais plus 135’000 hectares de forĂȘts. A titre de comparaison, depuis les annĂ©es 2000, environ 13 millions d’hectares de forĂȘt ont Ă©tĂ© dĂ©boisĂ©s pour produire du soja.

Ce qu’il faut savoir. La dĂ©forestation Ă  des fins de culture agricole est un phĂ©nomĂšne bien identifiĂ© en Amazonie, notamment pour le soja. Pourtant, les enjeux autour de l’açai sont diffĂ©rents, selon Nathalie Cialdella:

«En Amazonie, la forĂȘt a toujours valu «zĂ©ro». L’açai permet de montrer qu’il est possible d’établir des Ă©conomies basĂ©es sur une forĂȘt qui n’est pas dĂ©truite.»

Certaines plantations naissent en terre ferme amazonienne, loin des marĂ©cages oĂč pousse naturellement l’açai. Un nom est donnĂ©: «l’açaisation».

❓ Le dĂ©but d’une industrie en monoculture? Nathalie Cialdella tempĂšre:

«Les populations locales ont eu tendance Ă  favoriser l’açai par rapport Ă  d’autres espĂšces, pour rapprocher les cultures plus prĂšs des habitations. Cette technique reste trĂšs localisĂ©e par rapport Ă  l’immensitĂ© de la forĂȘt amazonienne.»

L’argument marketing.

Si on retrouve de l’açai un peu partout en Suisse et en Europe, c’est pour son cĂŽtĂ© «super-aliment», dont les sportifs raffolent.

Graines de chia, baies de Goji ou mĂȘme avocats, on les appelle ainsi parce qu’ils affichent des apports nutritionnels supposĂ©s intĂ©ressants, notamment des antioxydants, des vitamines et des protĂ©ines.

⚗ CĂŽtĂ© science, c’est un peu plus complexe. Il n’existe pas de dĂ©finition scientifique de ce qu’est un superaliment.

Dans l’açai, ce sont surtout les anthocyanes, Ă  qui on prĂȘte des qualitĂ©s antioxydantes, qui justifient le qualificatif de «superaliment». Mais la sociĂ©tĂ© suisse de nutrition n’est pas emballĂ©e: il n’y en a pas plus dans l’açai que dans les myrtilles suisses…

Une trajectoire «à la quinoa». Un autre «superaliment» super connu qui a eu un super succĂšs, c’est le quinoa.

En 2013, l’ONU dĂ©clare l’«annĂ©e internationale du quinoa» et lance une importante campagne de promotion. RĂ©sultat: la demande s’envole, la production aussi.

Effet immĂ©diat: aprĂšs s’ĂȘtre envolĂ©, le prix du kilo de quinoa est depuis en forte baisse, ce qui a causĂ© des tensions pour les populations locales qui vivent de son Ă©conomie.

Pour Nathalie Cialdella, une explosion de la production industrielle d’açai ne va pas de soi. Trois raisons principales:
La rĂ©colte de l’açai sauvage se fait surtout par les autochtones, dans des zones humides difficiles d’accĂšs.
Une culture industrielle consommerait beaucoup d’eau (120 litres par pied), avec des coĂ»ts de transformation Ă©levĂ©s.
Cette baie se dĂ©grade rapidement, de sorte qu’il est dĂ©licat de la transporter sur de longues distances.

Pour l’instant, la consommation d’açai au BrĂ©sil reste trĂšs locale: environ 80% dans les Etats amazoniens, 15% dans le reste du pays et 5% Ă  l’international. Si la tendance se poursuit, reste Ă  voir comment les producteurs pourront rĂ©pondre Ă  la demande.

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L’explosion de la production. Aujourd’hui, 1,5 million de tonnes de fruits sont produites selon les chiffres enregistrĂ©s en 2018, «mĂȘme s’il y a Ă©normĂ©ment de donnĂ©es non rĂ©pertoriĂ©es, notamment par rapport Ă  l’autoconsommation», nous dit Nathalie Cialdella. La superficie consacrĂ©e Ă  la culture de l’açai (en jaune ci-dessus) a connu une poussĂ©e fulgurante depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000, augmentant mĂ©caniquement la production (en vert). Un succĂšs commercial motivĂ© par les marchĂ©s internationaux? Non, 80% de la production est toujours consommĂ©e en Amazonie.

Lire l’interview complĂšte sur Heidi.news (FR)

De bonnes lectures

Aller simple vers le BrĂ©sil. Dans ce reportage de 13 minutes, Arte nous fait voyager dans l’Etat du ParĂ , oĂč l’on cĂ©lĂšbre la baie d’açai, «fruit de la survie», plus consommĂ© que le lait de vache dans cette partie du BrĂ©sil. On s’y inquiĂšte du prix en augmentation, et de l’essor des monocultures.

Arte (accĂšs libre) (FR)

Le quinoa boom. Nous en parlions plus haut: l’açai va-t-il connaĂźtre la mĂȘme trajectoire que le quinoa? En 2016, LibĂ©ration a publiĂ© une superbe enquĂȘte sur le dĂ©veloppement de cette graine, «des hauts plateaux andins Ă  nos assiettes». Ou comment ses exportations en hausse de 260% entre 2012 et 2014 (vers les Etats-Unis et l’Europe, selon la FAO) ont dĂ©stabilisĂ© les agriculteurs boliviens et pĂ©ruviens.

Libération (accÚs libre) (FR)

Superfruit, vraiment? Pour rencontrer un marchĂ© toujours plus important dans les pays occidentaux, l’açai est volontiers vendu comme un «superfruit». L’argument marketing est connu, puisqu’il concerne Ă©galement avocats, curcuma ou mĂȘme la banane, premier superfruit. L’école de santĂ© publique de Harvard fait le point sur l’aspect nutritif de ces superaliments, et recommande plutĂŽt une super assiette.

Site de la Harvard School of Public Health (accĂšs libre) (EN)

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