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L'agriculture, grande absente de la loi climat

Keystone / Urs Flueeler

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➢ L’agriculture est la grande oubliée de la loi climat, qui doit être votée le 18 juin prochain. Pourtant, son empreinte carbone est loin d’être négligeable.

➥ Loin d’être un oubli, ce choix résulte d’une certaine complexité et d’une stratégie politique délibérée.

🐄 L’agriculture, une empreinte carbone en trompe-l’œil.

 ● L’agriculture représente 14% des émissions de gaz à effet de serre (GES) en Suisse…

 ● … Elle est le 4e poste d’émissions en Suisse, derrière les transports (31%), l’industrie (24%) et le logement (18%).

 🧮 Cette empreinte carbone est même sous-évaluée, notamment parce que seules les émissions générées sur le sol suisse sont décomptées.

➥ En 2018, les denrées alimentaires consommées en Suisse représentaient 15,6 millions de tonnes d’équivalent CO2 – le double de la seule empreinte agricole seule. Le différentiel est surtout lié aux importations.

💀 Trop complexe pour légiférer? Jacques Bourgeois, président de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (Ceate-N):

  «Nous n’avons pas, au vu de la complexité du sujet, fixé des objectifs contraignants.»

➥ Pour lui, la complexité est avant tout technique: la principale difficulté réside dans le fait que 85% des émissions proviennent de l’élevage, sujet politiquement brûlant en Suisse.

Christophe Clivaz, député vert et également membre de la commission, souligne:

  «Il y a beaucoup d’émissions de GES qui sont diffuses et donc difficiles à capter, contrairement par exemple aux processus industriels où on peut développer des solutions technologiques afin de capter le CO2 émis à la sortie de l’usine.»

🌊 Pas de vague?

➢ La stratégie climatique à long terme du Conseil fédéral se mêle pourtant des pratiques agricoles: elle vise 10% de GES en moins entre 2015 et 2025, entre autres grâce à une meilleure gestion des fertilisants et, aussi, plus de surfaces dédiées à la production végétale.

➢ Ces objectifs n’ont pas été repris par la Ceate-N, à dessein. Christophe Clivaz:

  «Afin de ne pas susciter l’opposition des milieux agricoles, une majorité de la commission a estimé que ce n’était pas une bonne idée politiquement.»

➥ La stratégie a en tout cas porté ses fruits au plan politique. L’Union suisse des paysans (USP) a apporté son soutien à la loi fédérale…

➥ … et s’est attiré l’ire de l’UDC, seul parti au Parlement à s’opposer à la loi climat.

🐘 L’éléphant dans la pièce. Reste un paradoxe:

 ● L’UDC dénonce la loi fédérale comme une attaque frontale contre les éleveurs et s’élève contre «une réduction drastique de l’élevage en Suisse».

 ● De telles mesures sont pourtant absentes du projet de loi climat.

➥ Mais la Suisse pourra-t-elle éluder indéfiniment la nécessité de réduire ses cheptels, et par la même occasion, ses émissions agricoles?

Pour aller plus loin

🟢 L’essentiel à connaître sur la loi. Quelle différence avec l’initiative pour les glaciers et la loi sur le CO2? Quelles sont les mesures prévues? Nos réponses à vos questions.

🟢 En dehors de la viande, quels aliments émettent du CO2? On y retrouve deux totems de la gastronomie suisse.

🟢 Le CO2, mais pas seulement! Pollution de l’eau, excès en fertilisant… on fait le bilan environnemental du riz, du porc ou du maquereau, sans se limiter à l’empreinte carbone.

🟢 Oui, la viande peut être bénéfique pour l’environnement. C’est contre-intuitif, et pourtant!

De bonnes lectures

Une scission entre UDC et USP. L’Union suisse des paysans a décidé de dire «oui» à la loi sur la protection du climat, mais la profession agricole est divisée sur la question. D’aucuns craignent à l’avenir un moindre soutien aux agriculteurs de la part du parti dit agrarien.

Ferme cherche repreneur. Avoir une agriculture moins émettrice de gaz à effet de serre, c’est bien. Avoir des exploitations, c’est mieux. Chaque jour, trois fermes mettent la clef sous la porte dans le pays. Pourtant, les formations aux métiers de la terre attirent.

A la ferme, le marché du CO2 coince. En 2022 s’ouvrait à l’agriculture les marchés volontaires de carbone. Le principe: réduire ses émissions et vendre des certificats CO2 à d’autres entreprises. Mais la démarche se heurte à des problèmes techniques et une spéculation économique.